Dans le sillage du Festival Accès Asie, nous nous sommes entretenus avec Ziya Tabassian, un percusionniste iranien installé à Montréal.
Qui est Ziya Tabassian ?
Je suis un musicien d’origine iranienne, vivant au Québec depuis presque 26 ans ! Je suis né à Milan, mais mes parents sont retournés en Iran quand j’avais un mois ! J’ai vécu 11 ans en Iran avant d’immigrer au Canada avec ma famille.
Quel est votre parcours ?
J’ai commencé la pratique de la percussion à l’âge de 10 ans. J’ai eu mon premier instrument, le tombak, à l’occasion de mes 10 ans. À notre arrivée au Canada en 1990, j’ai étudié le violon à l’école secondaire Saint-Luc durant 5 ans. À l’âge de 14 ans, j’ai commencé l’apprentissage de la percussion occidentale auprès de Julien Grégoire et j’ai obtenu mon Baccalauréat en interprétation à l’Université de Montréal. En 2003, durant une résidence au Banff Center for the Arts, j’ai exploré les possibilités sonores et la musique contemporaine sur des instruments de percussion d’Iran. En 2006, j’ai enregistré mon premier album solo au tombak, portant sur mes recherches sonores et les cycles rythmiques de la musique ancienne persane. J’ai continué mon apprentissage avec des maîtres de percussion de différentes cultures, tel que Misirli Ahmet (Turquie), Trichy Sankaran, Shree Sundarkumar et Yogesh Samsi (Inde).
Qu’est-ce qui vous a amené à choisir la carrière musicale ?
Déjà à l’âge de 14 ans, j’avais déjà décidé que la musique ferait partie intégrante de ma vie et que ce serait ma carrière !
Vous êtes entre deux cultures, iranienne et occidentale. Qu’est que cela vous apporte en tant qu’artiste ?
Au début, quand on a immigré au Canada, j’essayais de conserver ma culture iranienne et je voulais résister à m’intégrer à la culture québécoise… Après quelques années, lorsque je suis retourné en Iran, je me suis rendu compte que j’avais changé, et que j’avais malgré tout deux cultures ! Après une crise identitaire, j’étais bien content d’avoir deux cultures et je trouvais ça enrichissant ! Maintenant, à chaque place que je voyage, j’essaie de m’imprégner de la culture locale et de m’enrichir avec différents points de vue, façons de vivre… Donc, je ne me considère pas être entre deux cultures, mais bien enrichie de plusieurs cultures !
Y a-t-il un pays et un artiste qui vous ont influencé ?
Les dernières années, j’ai beaucoup voyagé en Inde et c’est une culture qui m’a beaucoup inspiré, en autres au niveau rythmique ! Les artistes qui m’ont beaucoup inspiré sont entre autres Misirli Ahmet, Zohar Fresco, Zakir Hussain, Shree Sundarkumar, Yogesh Samsi.
Qu’est-ce qui distingue les percussions traditionnelles iraniennes et occidentales ? Se rejoignent-elles parfois ?
Selon moi, un instrument reste un « instrument » et c’est la façon que l’artiste l’utilise qui peut-être différente. Donc, bien que traditionnellement différentes, les percussions iraniennes et occidentales peuvent se rejoindre !
Présentez-nous le tombak.
Le tombak est l’instrument de percussion principal de la musique traditionnelle persane. C’est un instrument de la même famille que le djembé africain ou le darbouka arabe. Le tombak est taillé dans un seul morceau de bois, avec une peau de chèvre ou d’agneau. L’instrument est joué avec les doigts des deux mains. Le nom « tombak » vient des deux sons de base de l’instrument, le tom (son grave) et le bak (son aigu). Mais évidemment, les sons qui peuvent être produits par l’instrument sont presque infinis !
Vous participez depuis plusieurs années au Festival Accès Asie. Comment s’est faite cette collaboration ?
Depuis plusieurs années, j’ai la chance de participer au Festival Accès Asie. Je trouve que c’est une très bonne plate-forme pour les artistes d’origine asiatique. Depuis 21 ans, je trouve que le festival a une belle programmation et chaque année le festival grandit et mûrit. Le festival à 21 ans et comme dans, beaucoup d’endroits, c’est l’âge de la majorité ! 😉
Pourquoi avoir gardé le thème du Golestan ?
Golestan, qui veut dire « jardin de fleurs », je le vois comme un lieu de rencontre entre différentes cultures et formes d’arts qui peuvent se côtoyer et s’enrichir. C’est un thème que je cultive dans ma vie personnelle et professionnelle ! Dans la première édition de Golestan, nous avons mis ensemble la musique persane et la musique indienne, lors de la deuxième édition, la musique de l’Anatolie, du Kurdistan, de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan… Et cette année, c’était la rencontre de la musique et de la danse du Khorasan, de l’Afghanistan et de l’Asie centrale.
Quelle est la différence avec les années précédentes ?
Cette année on a eu la chance de travailler avec de la danse. En plus avec le volet international, on a eu la chance de recevoir Miriam Peretz et Efrein Lopez.
Votre spectacle du 26 mai dernier, mêlant donc danses et musique, a rencontré un grand succès. Qu’avez-vous ressenti ?
Je pense que les gens ont bien apprécié le spectacle. Et aussi nous les artistes, nous étions très contents de cette rencontre et nous voudrions continuer de travailler ensemble.
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Pour revenir à votre travail, qu’appréciez-vous le plus dans votre processus de création ?
J’aime presque tout dans le processus de création. J’aime beaucoup les rencontres. Je trouve ça très enrichissant ! Autre chose que j’apprécie dans le processus de création, c’est l’incertitude et le fait que ce n’est jamais monotone !
Votre plus grande satisfaction artistique !
Je suis toujours à la recherche de nouveaux défis et je trouve qu’il y a toujours de la place pour l’amélioration. Donc je ne peux jamais dire que je suis satisfait artistiquement à 100 %. Mais j’ai beaucoup de plaisir à créer et ma plus grande satisfaction se trouve dans le processus de création.
Avez-vous gardé des contacts avec l’Iran ? Y avez-vous donné des concerts ?
Avant je retournais plus régulièrement en Iran. Mais la dernière fois remonte en 2007 et c’était pour un concert. J’espère bien y retourner bientôt et pouvoir y présenter mon travail !
Un projet que vous aimeriez concrétiser.
Je suis en train de travailler sur mon deuxième album solo ! Je travaille aussi avec d’autres musiciens dans différents projets artistiques.
Entretien réalisé par Pascal Marion le 6 juin 2016